Evan auf seinem Velo: In Moutier haben Jugendliche einen partizipativen Prozess angestossen, der von der Politik mit offenen Armen aufgenommen worden ist.

Moutier: une commune innovante en matière de participation

18.06.2021
6 | 2021

En donnant suite à la demande de trois jeunes enthousiastes, la ville de Moutier a décidé d’appliquer une approche participative à l’aménagement d’une place publique. Elle veut saisir l’occasion pour ancrer la participation citoyenne dans le fonctionnement communal.

Depuis plusieurs années, la Commune de Moutier propose des prestations qui doivent permettre à sa population d’acquérir ou de renforcer ses compétences démocratiques. Partant du principe que la participation au débat public nécessite un apprentissage par la pratique et que le niveau local est le plus approprié pour ce faire*, la municipalité a chargé le Service de la jeunesse et des actions communautaires (SeJAC) de développer des actions visant à favoriser la participation, avec un focus sur un public jeune et éloigné des différentes formes de pouvoir.

«PM23» est le titre provisoire d’un projet qui trouve son origine en 2017. Cette année-là, une centaine de citoyennes et de citoyens prennent part au projet «Tourner la page» dont l’objectif est de critiquer, de rêver et de transformer la bibliothèque de la petite ville de Moutier, qui compte environ 7400 habitants. Au terme des ateliers participatifs, trois jeunes enthousiastes proposent à l’équipe d’animation du SeJAC d’appliquer les mêmes méthodes participatives pour réaménager une place publique.

Jan Ferkovic, Mirsad et Senad Zahaj ont alors entre 12 et 15 ans. Ils fréquentent le Centre de jeunesse et y travaillent, à leur rythme, les compétences démocratiques: «S’exprimer, écouter, arbitrer et s’engager.»* Avant de pouvoir prendre part à des ateliers participatifs, ces jeunes prévôtois ont été acteurs de l’accueil libre du Centre de jeunesse, espace favorisant l’autogestion, l’expérimentation, l’émancipation et l’autonomie. Par son fonctionnement, le Centre de jeunesse peut donner une image d’un lieu où les jeunes ne font que «se réunir». Or, l’équipe du SeJAC propose un environnement exigeant. Les professionnels partagent avec les jeunes la responsabilité d’établir et de faire respecter les règles qui permettent un accueil inconditionnel et quasi quotidien. Le Centre de jeunesse est autre chose qu’un centre de loisirs. Il revient aux usagères et aux usagers d’élaborer le programme qui correspond à leurs besoins. Chaque activité doit proposer de l’intérêt du point de vue de l’animation socioculturelle: participer au lien social, favoriser l’éducation informelle, soutenir la prévention, … C’est dans ce contexte et à travers des activités d’apparence banale comme organiser une soirée festive, s’occuper du matériel, résoudre un conflit ou encore réaliser des «petits jobs» que Jan, Mirsad et Senad ont fait l’expérience consciente de la citoyenneté.

«Tourner la page» a été pour les jeunes précités, ainsi que pour une trentaine de leurs pairs, l’occasion de transposer les compétences acquises dans le Centre de jeunesse à l’espace public et de se confronter, dans un cadre sécurisé et adapté, à un exercice de démocratie locale avec des citoyens adultes actifs dans la vie sociale ou politique prévôtoise. La demande de ce groupe de participer au réaménagement de la ville démontre que ces jeunes ont acquis des compétences mais aussi un sentiment de légitimé fort et durable. Ils se projettent désormais comme des citoyens, rendant visible l’effet «tremplin» du centre de jeunesse vers une citoyenneté active.

En janvier 2018, Jan, Mirsad et Senad se sont saisis de l’outil «ADN» («Ask Direct Now»), une chaîne YouTube qui permet aux jeunes de dialoguer avec les autorités de la ville. Dans une vidéo, ils y ont interpellé les élus sur la nécessité et leur envie de réaménager une place publique. Cette demande a été relayée par des élus du conseil de ville (législatif). Suite à une décision politique, un groupe de pilotage a été mis sur pied par la municipalité en 2019. Celui-ci a alors sollicité le SeJAC afin de définir les méthodes permettant la réalisation participative du réaménagement de cette place.

Fin 2019, le conseil municipal a validé l’idée que l’organisation de «PM23» soit déléguée à un groupe de travail qui permette une large représentation des institutions et de la population. Une place particulière est faite aux publics cibles du projet qui sont la jeunesse, les personnes migrantes ainsi que les citoyens éloignés des cercles de décisions communales. Ce groupe de travail va organiser la phase «pratique» du réaménagement participatif de la place du collège. Celle-ci prendra la forme de trois ateliers, situés fin 2021, ouverts à l’ensemble de la population. Il va ensuite être acteur d’une deuxième phase «conceptuelle» qui aura lieu entre 2022 et 2023 et au terme de laquelle il proposera un catalogue de mesures concrètes destinées à améliorer la participation citoyenne en ville de Moutier.

Cette approche participative est soutenue par les autorités de la ville et notamment par Claire-Lise Coste, conseillère municipale en charge du dicastère des sports, de la culture, de la jeunesse et de la santé publique. Pour cette élue, «les démarches participatives sont efficaces car elles permettent de se rapprocher de la réalité et des besoins des citoyennes et des citoyens.» Elle ajoute que son rôle de membre de l’exécutif communal n’est pas tant d’imposer ses idées mais plutôt «de donner les moyens à la population de formuler et de réaliser les siennes». «On peut donner la parole au peuple aussi en dehors des votations, bien sûr!»

«Les démarches participatives sont efficaces car elles permettent de se rapprocher de la réalité et des besoins des citoyennes et des citoyens.»

Claire-Lise Coste, conseillère municipale de Moutier

Le projet initié par Mirsad, Jan et Senad, est aussi soutenu par la Confédération via le programme «Citoyenneté» ou encore par la Fondation Mercator. Ces institutions offrent à la Municipalité de Moutier une reconnaissance au niveau national pour son engagement et son innovation en faveur de la participation et de la démocratie, ainsi qu’un soutien financier supérieur à 100 000 francs. Ces subventions seront gérées par les participants au groupe  de travail, qui n’ont pas encore pu se réunir en raison du COVID-19.

Dans l’attente que «PM23» puisse reprendre son cours, Senad Zahaj, aujourd’hui âgé de 16 ans, appelle déjà la population à se mobiliser quand le moment sera venu: «nous avons besoin d’un projet commun. Le but est que tout le monde puisse donner son avis, peu importe son âge, son statut social ou son origine.»

Silvère Ackermann
Animateur socioculturel HES et chef du Service de la Jeunesse et des Actions Communautaires
Ville de Moutier

*Bassand, M., Kaufmann, V. et Joye, D. (2007). Enjeux de la sociologie urbaine. Les Presses polytechniques fédérales et universitaires romandes.